lundi 5 mars 2012

A pied, en train, en bateau...suivez-moi en Chine

A Changsha, capitale du Hunan, Mao-tsé-toung, natif d'un village situé à une centaine de kilomètres, Shaoshan, fit ses études universitaires.

En raison de sa situation géographique assez centrale, c'est un important noeud ferroviaire d'où la fondation de l'université des chemins de fer la plus importante de Chine. J'y fus professeur de français pendant tout un semestre avant de partir pour la Mandchourie. C'est alors que je décidai de faire le tour du sud de la Chine en utilisant différents moyens de transport.
Pendant les vacances du nouvel an chinois, de la mi-janvier à la mi-février, je me suis lancée par les chemins de fer, d'eau et de terre qui sillonnent ces régions du Hunan, Sichuan, Yunnan, Guizhou...
De Changsha, deux petites heures seulement dans un train tiré par une ancienne locomotive à vapeur de fabrication française (Alsthom) me permettent d'arriver au bord du fleuve bleu, le Yang-tsé-kiang. Sans difficulté, j'achète un billet à la gare fluviale pour remonter le fleuve. Il faudra 4 jours pour relier Yuéyang, centre de la partie navigable du fleuve, à Chongqing, le terminus en amont. Le deuxième jour de la "croisière"nous passons à travers trois gorges successives qui nous transportent soudain dans le fantastique, dans une sorte d'apesanteur: une brume cotonneuse dévoile au fur et à mesure les falaises qui nous entourent, elles se referment derrière nous comme pour nous enfermer et nous détacher de la terre. C'est féérique!
Nous flottons, frêle embarquation, dans un monde magique qui donna tant d'inspiration aux poètes chinois.
Mais la vie sur la bateau est moins romantique. Pour mieux participer à la vie chinoise, j'ai pris un billet de 4eme classe (il n'y en a que 4, la 5eme ne donnant pas de lit mais seulement le droit de monter a bord). Notre cabine s'étend en un long couloir d'un bout à l'autre du bateau dans le sens de la largeur. Six lits superposés sont disposés bout à bout de chaque côté, ce qui offre 24 places. Les journées se passent sur le pont arrière quand on peut y parvenir en enjambant tous ceux de 5eme classe qui sont allongés ça et là, ou bien dans la cabine à jouer aux cartes ou discuter. Mes voisins ont installés un carton en guise de table et jouent dessus toute la journée. Ceux qui ne lisent pas (la majorité) ou qui ne tapent pas le carton, mangent. Ils épluchent des kilo de mandarines, craquent des milliers de graines de tournesol dont les coques tombent en pluie autour d'eux, aspirent des nouilles en sachet qu'ils ont fait gonfler dans un bocal avec l'eau bouillante du bateau, bref ils s'occupent. Un amas de déchets extraordinaire se forment en 2-3 heures formant un épais tapis tout le long de la mince allée qui sépare les deux rangées de lits. Régulièrement, les gens de service viennent pousser tout cela par dessus bord!
La cantine distribue des repas dans des petites boites blanches en plystirène; celles-ci, vides ou à moitié pleines, forment bientôt une longue flotille, dansant sur le fleuve au gré des remous et des vagues de notre "bateau-amiral".
Un désastre écologique!
oeufs de cent ans
La nourriture à bord est acceptable, mais comme beaucoup, je préfère attendre chaque escale pour aller me ravitailler en fruit, oeuf salé, "oeuf de cent ans", viandes et poissons séchés, légumes marinés, tofu fermenté...bref...une nourriture de voyage! Souvent nous ne pouvons pas débarquer, alors les achats se font au moyen d'un panier au bout d'un long manche qui offre la marchandise et récupère l'argent.
En général, nous nous levons assez tôt, vers 6h du matin, mais les chinois se recouchent ensuite à 9 heures, déjeunent à 11h, redorment à 14h, dînent à 18h et ont devant eux une longue soirée jusqu'à 22-23h.
Les douches sont bien chaudes et agréables, mais les toilettes sont un endroit où je ne paux entrer qu'en apné! avec mes courts cheveux noirs,  mon teint mat tendant vers le jaune et ma longilinité, certaines jeunes filles m'ont prises pour un garçon chinois!!!! j'ai ainsi provoqué quelques troubles chez certaines d'entre elles: tout d'abord mon entrée dans les toilettes-dames en a fait fuir plus d'une, puis ce fut une petite Ly, fort sympathique, qui me tourna autour pendant les 3 premiers jours, n'osant pas m'aborder. Heureusement à la fin de ce troisième jour, elle entendit le son de ma voix et du coup, plus hardie vint vers moi et utilisa ses quelques notions d'anglais pour ouvrir la conversation: elle aussi m'avait prise pour un charmant Chinois...d'où sa timidité.
Chongqing, terme de notre croisière, est une ville très ancienne bâtie sur les pentes abruptes du fleuve. Les rues en lacets sont raides et de nombreux escaliers permettent de gravir ses différents paliers. Ainsi suspendue, elle est rivée à ces eaux qui la font vivre, entièrement dévouée à son port d'où partent et aboutissent tous les intérêts.
joueurs de majong
Mon voyage par voie d'eau se terminant, je prends le train pour Chengdu, capitale du Sichuan. Ville réputée apr sa cuisine relevée et fortement épicée, elle accueillit des consuls de France avant la révolution culturelle. Très typique, mais se modernisant rapidement, j'y découvre un monastère bouddhique abritant un salon de thé. C'est plutôt un jardin fleuri et verdoyant parsemé de petites tables et sièges en pierre où de nombreux Chinois viennent passer leur temps libre. Des moines passent et repassent, une bouilloire à la main pour remplir les tasses qui se vident. Les gens de tous âges jouent aux cartes, aux échecs, au majong. C'est animé mais reposant, tout le monde n'est que sourire et amabilité: un petit coin de paradis.
De Chengdu, je rejoins, encore par le train,une petite ville méridionale: Penzihua. Là, je logerai dans la famille d'un de mes étudiants. Tout près, dans les montagnes, un village-chantier regroupent des Français, des Allemands, des Italiens qui construisent le plus gros barrage de Chine.
fille de la minorité Bai
Au bout de trois jours, un matin, je prends un bus pour aller à Dali, village regroupant la minorité éthnique Baï, sous les contre-forts du Tibet. Plus de douze heures de voyage à travers les montagnes me permettront de l'atteindre. Les routes tortueuses, les nids de poule rendent le voyage très inconfortable, d'autant plus que l'espace entre les sièges est réduit aux dimensions chinoises.
lac Erhai à Dali
Le bus est plein, des sacs de toutes demensions encombrent le couloir, et il va, cahin-caha, penchant dangereusement dans les virages sous le poids du toit trop chargé. Des odeurs fumées, aillées, fermentées de victuailles s'échappent des sacs en plastique des voyageurs qui se laissent balloter sans un mot, somnolant. Les hommes enfument le maigre espace vital de leurs cigarettes qu'ils consomment sans modération, tandis que les ouvertures du bus laissent passer toute la poussière de la route.
A suivre